La fête de la Toussaint (le 1 novembre) et celle de tous les fidèles défunts (le 2 novembre) arrivent à grand pas. A cette occasion, l’Eglise rappelle la possibilité d’obtenir des indulgences pour les morts. Mais que sont exactement les indulgences et comment les obtenir ? Voilà des questions malheureusement pas assez traitées dans la pastorale contemporaine. On ne parle plus des fins dernières, on n’affirme plus la doctrine du Purgatoire, et les souffrances qui y sont présentes. Il est très dommage, pour nous comme pour les âmes du Purgatoire, de laisser passer une telle occasion de les libérer de leurs tourments. Essayons d’y voir plus clair.
Le jugement particulier :
A l’instant de la mort, c’est-à-dire quand l’âme quitte le corps, cette dernière est jugée par Dieu. A sa lumière, l’âme humaine se voit comme Dieu lui-même la voit, en toute vérité. Si elle est parfaitement pure, elle accède au Paradis pour l’éternité. Si la personne est décédée en état de péché mortel, qui est une négation de l’amitié avec Dieu, elle reste dans ce refus et cette négation pour toujours, et c’est cela que l’on appelle l’Enfer : l’absence de Dieu, qui est pourtant ressenti comme un besoin vital et la source de toute joie. L’âme damnée se rend compte que la vision béatifique aurait fait son bonheur parfait, et qu’elle en est privée pour toujours, par sa faute.
Cependant, si la personne décède en état de grâce, mais insuffisamment préparée au bonheur du Ciel, un temps de purification plus ou moins long est nécessaire. Le Purgatoire a pour fonction de supprimer ce qu’on appelle les peines temporelles dues au péché. En effet, en plus du péché lui-même (une atténuation ou une disparition de l’amitié divine dans l’âme), une faute entraine également un attachement malsain aux créatures, ainsi qu’un désordre dans le monde. C’est cela que l’on appelle les « peines temporelles ». C’est d’ailleurs la raison pour laquelle en plus de l’absolution sacramentelle qui pardonne les péchés, le prêtre au confessionnal donne au pénitent une « pénitence sacramentelle », autrement dit une prière ou une action à réaliser, dont le but est précisément de supprimer ces peines temporelles dues pour les péchés.
La communion des saints et le mérite :
Mais comment cela fonctionne-t-il ? Cela fonctionne en vertu de deux notions très importantes dans la doctrine catholique : le mérite et la communion des saints.
Toute personne en état de grâce peut acquérir, par ses bonnes œuvres, ce qu’on appelle des mérites surnaturels. L’être humain participe à sa propre rédemption, en union avec le sacrifice du Christ, en ayant la joie et la légitime fierté d’être pour quelque chose dans sa béatitude éternelle. Mais pour obtenir un quelconque mérite surnaturel, il faut que notre âme soit dans un état surnaturel, c’est-à-dire l’état de grâce.
En ce qui concerne la communion des saints, à la quelle nous disons croire dans le Je crois en Dieu, il s’agit d’un certain partage de ces mérites entre tous les membres, vivant ou morts, de l’Eglise. Le Christ, le Sainte Vierge, les saints de toutes les époques ont acquis des mérites pour l’ensemble de l’Eglise, ce qui constitue une sorte de trésor de grâces, une forme de réserve. L’Eglise, en vertu de son mandat divin, peut décider de la manière de « dépenser » ce trésor. Quand nous prions pour quelqu’un, notre prière est efficace en vertu de cette communion des saints : nous demandons à Dieu que les mérites de notre prière soient appliqués à la personne pour laquelle on prie. Ainsi, les élus dans le Ciel et les âmes du Purgatoire prient pour nous continuellement. Le problème, c’est que les âmes dans le Purgatoire ne peuvent plus rien pour elles-mêmes : on dit que le temps du mérite est révolu pour elles. Tout allègement de leur peine qu’elles pourraient obtenir, elles ne l’obtiendraient que de l’Eglise et de ses membres vivants. C’est la raison pour laquelle nous faisons célébrer des messes à l’intention des défunts, ce qui est une pratique très charitable.
Les indulgences :
Les indulgences sont une des manières de soulager les âmes du Purgatoire. Toujours en vertu du pouvoir donné par le Christ, l’Eglise décide d’ajouter au mérite d’une action ou d’une prière, une partie des mérites du trésor de grâces dont elle a la garde. Ainsi, à certaines occasions, nous pouvons obtenir une indulgence plénière ou partielle (remise totale ou partielle de la peine de Purgatoire) pour nous, ou pour les défunts. Plusieurs conditions sont posées pour les obtenir : être en état de grâce, réaliser l’action prescrite, prier aux intentions du Souverain Pontife, communier à l’Eucharistie, et recevoir le sacrement de pénitence dans les jours qui précèdent ou qui suivent.
Être en état de grâce, c’est une évidence, puisque nous avons dit qu’aucun mérite surnaturel ne peut être obtenu en état de péché mortel. L’action prescrite varie pour chaque indulgence : ce peut être la réalisation d’un pèlerinage, une adoration eucharistique, la visite d’un cimetière, etc. On retrouve l’ensemble des indulgences offertes par l’Eglise dans le Manuel des Indulgences, publié par le Vatican en 1999. La prière aux intentions du Pape n’est pas la prière récitée pour le pape, même si une telle prière est très bonne. Il s’agit plutôt de prier aux intentions pour lesquelles le Pape, en vertu de sa charge, est obligé de prier lui-même : l’unité de l’Eglise, la conversion des pécheurs, etc. Enfin, la confession et la communion nous permettent d’être dans le meilleur état possible pour demander son aide au Bon Dieu.
Le cas de la semaine de la Toussaint :
Le jour de la Toussaint, et les huit jours qui suivent, une telle indulgence plénière peut être obtenue quotidiennement au bénéfice des fidèles défunts. Le jour même, l’action prescrite est la visite d’une église. Ainsi le fait d’assister à la messe de la Toussaint permet déjà de remplir plusieurs conditions : action prescrite, communion, confession éventuelle. Il ne nous reste qu’à prier aux intentions du Pape, et nous pouvons tous, en ce jour, libérer définitivement une âme du Purgatoire et lui permettre d’accéder au bonheur du Ciel ! Le jour des tous les fidèles défunts (le 2 novembre), et les sept jours suivants (en raison de l’octave de la Toussaint), l’œuvre prescrite est la visite d’un cimetière. Il faut préciser qu’une seule confession est suffisante pour toutes ces indulgences, il n’est pas nécessaire de se confesser chaque jour ; en revanche si l’on veut obtenir l’indulgence plénière tous les jours de cette semaine, il faut communier quotidiennement.
Il est important de réaliser qu’en une semaine, chacun baptisé peut libérer sept âmes du Purgatoire ! Si tous les catholiques faisaient cet effort, le Purgatoire serait vidé chaque année, ou presque ! C’est le plus grand acte de charité que nous puissions faire pour les âmes des fidèles défunts, et la plus grande piété filiale pour les défunts de nos familles, bien plus utiles pour eux qu’un bouquet de fleurs sur une tombe.
Sources :
Constitution Apostolique Indulgentiarum Doctrina, Paul VI, 1967.
Manuel des Indulgences, Pénitencerie Apostolique, 1999.
Catéchisme de l’Eglise Catholique, 1992, nos 1032, 1471-1479.
Codex Iuris Canonici, 1983, can. 992-997.